Docteur André Barbeau - Neurologue*

L'extrême ampleur de l'oeuvre du Dr Barbeau se reflète dans ses nombreux écrits : 30 livres, 442 articles scientifiques, 10 prix nationaux et internationaux, 121 présidences de sociétés savantes, congrès, clubs de recherche, fondations de maladies – et d'innombrables conférences prononcées au Japon, en l'Europe, et en Amérique.

À eux seuls, les travaux d'André Barbeau ont propulsé l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) sur la voie des neurosciences. On retiendra sa colossale étude réunissant plus de 200 centres qui a permis d'identifier la carence métabolique à la source de l'ataxie de Friedreich; sa mise au point d'une méthode épidémiologique nouvelle – "l'écogénétique" – intégrant hérédité et environnement. Et surtout, son utilisation de la Lévo-dopa comme médicament efficace dans le traitement de la maladie de Parkinson.

André Barbeau est un modèle du clinicien-chercheur moderne. Après de brillantes études médicales, il a complété sa résidence en neurologie avant de se rendre à l'Université de Chicago pour y poursuivre des études post-doctorales. À son retour à Montréal, en 1962, il s'est joint au service de neurologie de l'Hôtel-Dieu tout en ouvrant un laboratoire à la Faculté de médecine de l'Université de Montréal. Débordant d'énergie et d'idées, André Barbeau entreprit alors des projets ambitieux mais réalistes à la fois sur plusieurs maladies neurologiques dégénératives. Celles qui ont le plus retenu son attention et qui l'ont propulsé aux faîtes de la neurologie internationale furent la maladie de Parkinson et l'ataxie de Friedreich.

Dès 1963-64, le Dr Barbeau avait réussi à démontrer que les malades atteints du Parkinson présentaient une diminution marquée de leur sécrétion de dopamine. Cette substance ne pouvait être administrée aux patients parce qu'elle ne traversait pas la barrière hémoencéphalique; il a imaginé contourner la difficulté en administrant du L-dopa qui est un précurseur de la dopamine et qui se rend directement au cerveau en doses suffisantes pour y être transformé en dopamine dans les régions déficientes. Ce fut une vraie révolution en neurologie et une des phases les plus excitantes de cette discipline.

Quant à l'Ataxie de Friedreich, André Barbeau s'attaquait à un problème plus complexe de maladie génétique assez répandue au Québec pour qu'un jeune patient, Claude St-Jean, prenne la décision de lancer une campagne de souscription publique pour aider le Dr Barbeau dans ses recherches. Ce fut une merveilleuse ouverture et un excellent partenariat qui a attiré l'attention de tous les concitoyens. Depuis sa mort prématurée, plusieurs de ses collègues ont continué son travail et ils ont presqu'identifié un gène apparenté à cette maladie.

André Barbeau avait hérité de son père non seulement de la compassion pour le malade mais aussi ses talents littéraires. Peu de temps avant son décès, André Barbeau fut intronisé membre de l'Académie canadienne-française. Pour marquer son entrée, il a composé un texte qui est devenu son testament personnel et constitue certainement son message personnel aux générations futures.

* Décédé le 9 mars 1986