
Sur les traces de l’Histoire
Le biochimiste J.B. Collip a isolé un extrait tissulaire du pancréas suffisamment pur pour procéder à des essais cliniques durant un congé sabbatique de l’université de l’Alberta, (u.de l’A.). Codécouvreur reconnu de l’insuline, Collip a par la suite poursuivi son œuvre pionnière de recherche en endocrinologie dans son laboratoire, au sous-sol de l’u.de l’A.
Ce même laboratoire, en 1992, était au cœur de la recherche biochimique du Protocole d’Edmonton, un procédé visant à isoler et transplanter des cellules du pancréas humain. Les premiers patients avec diabète de type 1 receveurs des îlots de Langerhans sont demeurés sans prise d’insuline pendant près de 1 an après la greffe.
À cette époque, Gregory Korbutt, jeune technicien nouvellement diplômé de la Northern Alberta Institute of Technology (NAIT), commençait à travailler en laboratoire sous la direction du Dr Ray Rajotte, fondateur du Groupe de transplantation des îlots de Langerhans.
« Après une année de travail avec Ray, j’ai décidé de continuer autrement qu’à simple titre de technicien », explique Dr Korbutt. Il s’est inscrit au programme de baccalauréat et de maîtrise à l’u.de l’A., reprenant son emploi au laboratoire l’été. Il a fait son doctorat en Belgique, et ses études postdoctorales à Edmonton. Il était au sein de l’équipe originale du Protocole d’Edmonton et aujourd’hui, il poursuit sa recherche sur la transplantation avec ses collègues de l’Alberta Diabetes Institute.
Une alternative à la transplantation des îlots pancréatiques
La recherche d’avant-garde qu’a menée Dr Korbutt a fait progresser le domaine de la transplantation des îlots pancréatiques vers une cure pour les diabétiques.
Dans les années 1990, il s’est mis au pas de la recherche pour une alternative à l’utilisation des îlots pancréatiques humains, en provisions toujours insuffisantes pour le besoin en transplantations à cause du peu de donneurs humains. Plusieurs chercheurs se sont mis à investiguer les îlots pancréatiques issus du porc adulte, mais ces cellules étaient extrêmement fragiles. D’instinct, le Dr Korbutt a décidé d’investiguer des cellules issues des îlots pancréatiques de pourceaux, nouveau-nés.
« La recherche fonctionne comme ça. On se dit, j’essaie ça, et parfois, ça fonctionne, a –t-il déclaré. On cherche de nouvelles avenues. Habituellement, ça ne fonctionne pas aussi bien que souhaité mais, quand ça marche, c’est formidable. »
Il a élaboré un protocole fiable pour isoler à grande échelle des cellules viables à partir de cette source. En collaboration avec ses collègues de l’u.de l’A., il publiait, en 1996 dans le prestigieux Journal of Clinical Investigation, un article, qui fait école depuis, « Large-Scale Isolation, Growth, and Function of Porcine Neonatal Islet Cells ».
Depuis cette découverte, le Dr Korbutt et ses collaborateurs, à Edmonton, et par la suite à Atlanta, ont procédé à des greffes des îlots de Langerhans issus de pourceaux sur des animaux modèles complexes – souris, porcs adultes et singes – et ont enrayé le diabète.
Cellules sécuritaires pour la recherche sur le diabète
« Quand en conférence, je m’adresse aux familles dont les enfants ont le diabète de type 1, je suis doublement motivé, explique Dr Korbutt. Cela met en évidence le pourquoi de ma recherche. »
Dr Korbutt et ses collègues procéderont d’ici peu à des greffes de cellules des îlots pancréatiques issus de pourceaux chez des humains, mais avant d’en arriver là, l’Alberta Diabetes Institute doit mettre en place un Guide de Bonnes Pratiques certifié afin d’assurer une production sécuritaire et constante des îlots de Langerhans issus de pourceaux en nombre devant suffire aux essais cliniques.
Pour construire à Edmonton un établissement de niveau international doté d’un Guide de Bonnes Pratiques certifié pour la production des îlots de Langerhans et autres cellules, il a obtenu 26 millions de dollars en subventions de la Fondation canadienne pour l’innovation, du gouvernement de l’Alberta et de l’université de l’Alberta. C’est le premier laboratoire de ce calibre, parmi les quatre au pays, à se construire dans l’Ouest canadien. Une fois bâti, Dr Korbutt en sera le directeur scientifique.
Selon Dr Korbutt, les essais cliniques de greffe des îlots de Langerhans issus de pourceaux pourraient commencer dès 2013. Les premiers receveurs seront sans doute les gens avec diabète dit fragile ou les diabétiques avec greffe de rein. Ces derniers étant plus enclins au rejet des îlots humains, qui entrent alors en conflit avec les antigènes du système immunitaire, spécifie-t-il.
Prochaines étapes : recherche sur les cellules souches
L’inauguration du Cell and Tissue Innovative Research Centre est prévue pour fin 2012 et il comportera cinq laboratoires consacrés à la recherche sur les cellules souches humaines. L’un d’eux sera voué à la recherche sur le diabète devant s’inscrire dans la seconde phase de recherche continue du Dr Korbutt pour trouver une cure.
Les études sur les cellules souches humaines ont plusieurs retombées, dit-il. Les scientifiques ont découvert que les cellules souches issues de la moelle osseuse du patient, une fois multipliées, peuvent être greffées conjointement avec les îlots chez le patient diabétique pour éviter le rejet – l’obstacle majeur à la réussite de la transplantation.
« L‘utilisation des îlots issus des pourceaux est prévue comme solution à court-terme, mais les cellules souches à partir des îlots humains demeurent la réelle solution à long terme, » déclare-t-il.
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